L’École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris commence sa transformation avec la déconstruction du bâtiment Vissol

L’École des Arts Décoratifs de Paris commence sa transformation avec la déconstruction du bâtiment Vissol

Pour l’Oppic, qui s’est vu confier la maîtrise d’ouvrage déléguée de la construction d’une extension de l’Ecole des Arts Décoratifs à Paris, ce projet est emblématique de ses engagements sociétaux visant à réinventer des espaces tout en intégrant des pratiques écologiques et innovantes.

Confié à l’agence LA Architectures, ce projet cherche à moderniser l’École en lui ajoutant des espaces essentiels, et vise à explorer de nouvelles façons de concevoir, d’éco-concevoir, et de créer dans une approche transdisciplinaire.
Le chantier débuté par une phase de fouilles archéologiques menées par l’INRAP (Institut National de Recherches Archéologiques Préventives) sous la direction de la DRAC Île-de-France, entre maintenant dans une étape cruciale : celle de la déconstruction du bâtiment Vissol.

Le réemploi une démarche durable

Partie intégrante de l’ambition environnementale de ce projet, le réemploi est une démarche durable à plusieurs titres. En remplaçant un matériau neuf par un matériau de réemploi, on agit sur plusieurs leviers à commencer par l’extraction des ressources et la transformation de la matière première en produit de construction. On réduit également la production de déchet en ne mettant pas à la benne un matériau qui peut encore servir. Le réemploi a donc un impact direct et mesurable sur la réduction de l’empreinte carbone liée au réchauffement climatique ainsi que sur la maîtrise des ressources.

Une démarche écologique et responsable


L’Oppic a mandaté dès la phase projet Cycle Up (AMO spécialisé en réemploi) pour qui : « Ce projet s’inscrit dans une démarche globale de déconstruction - reconstruction, visant à optimiser l’utilisation des matériaux existants tout en intégrant des solutions innovantes en raison des contraintes spécifiques du chantier, telles que le fonctionnement continu de l’école pendant les travaux, la parcelle exigüe en plein centre de Paris, et les exigences de réemploi des matériaux.

Tant l’Oppic que les architectes de LA architectes étaient porteurs, dés le départ, d’une forte ambition environnementale, le mode constructif envisagé privilégiant une ossature en bois avec remplissage en bottes de paille, le tout recouvert par un bardage en marbre issu du bâtiment existant « Vissol »

Optimisation et réemploi : des valeurs fortes pour un chantier complexe

Cycle Up souligne encore que « L’opération de réemploi la plus délicate dans ce projet concerne les plaques de marbre en bardage de façade. Il s’agit de 150 m² de marbre de réemploi, soit environ 12 tonnes, provenant des déposes soignées sur site ». L’entreprise complètera l’opération par un approvisionnement extérieur.

Djuna Patin, cheffe de projet réemploi chez Cycle Up précise que « dans le cas particulier du réemploi de bardage marbre, la difficulté consiste à prolonger la durée de vie d’un matériau de façade, un usage exigeant en termes de performances (tenue à la flexion, tenue à l’exposition aux éléments (température, pluie, vent,...), aux cycles de gel/dégel,...). En démontrant l’aptitude à l’emploi du matériau existant, on évite ainsi de dégrader la qualification de ses performances intrinsèques, comme cela aurait été le cas pour une remise en œuvre en revêtement intérieur ou sous forme de concassé dans un revêtement coulé.

Comme pour toute solution de réemploi touchant au clos-couvert, à la sécurité-incendie ou à la sécurité des personnes, le cadrage assurantiel est complexe et nécessite un fort degré de maîtrise et d’anticipation en amont du chantier. Le risque de désordre est élevé d’autant plus pour le marbre qui peut subir une décohésion granulaire lors d’un usage en façade. La mise au point d’un protocole de requalification adapté a nécessité plusieurs semaines de travail et des discussions nourries avec le bureau de contrôle du projet, ainsi qu’avec des experts et des laboratoires spécialisés sur ce type de matériau. Des échanges avec le fournisseur du système de pose ont également été nécessaires pour déterminer les adaptations permettant de passer d’un mode constructif en pose agrafée sur support béton (sous DTU) à une pose attachée sur ossature bois (sous avis technique).

Afin de sécuriser la « réemployabilité » du marbre dès la phase études, une entreprise a été consultée pour mener un test de dépose et des essais de transformation sur les plaques, et réaliser les éprouvettes nécessaires aux essais en laboratoire. Cette intervention en amont a permis :

  • D’élaborer une méthodologie de dépose soignée permettant de réduire le taux de perte des plaques à maximum 10% (0% de perte confirmé en phase chantier).
  • De vérifier la tenue du marbre à la transformation, notamment au rainurage des chants, et de valider son aspect de surface selon le type de finitions (simple nettoyage, ponçage fin…).
  • De vérifier les performances du marbre pour un usage en façade au regard des éventuelles altérations subies lors de sa première vie en œuvre. Pour ce faire, un plan de prélèvement par façade ainsi qu’un échantillonnage suivant plusieurs localisations dans l’ouvrage (couronnement, partie courante, etc.) ont été proposés et ont fait l’objet d’une validation par le bureau de contrôle. A noter que certains essais ont pris plusieurs semaines, comme par exemple pour la résistance aux cycles de gel/dégel.

Plusieurs solutions / bonnes pratiques ont été proposées en phase conception par l’architecte et en phase chantier par l’entreprise pour simplifier au maximum les opérations de réemploi :

  • Une rotation des plaques de 90° permet de retrouver des chants lisses dans lesquels il est plus facile de rainurer. Le format carré des plaques permet de conserver une disposition similaire à l’existant ainsi qu’un sens de veinage homogène, rappelant celui de la façade du bâtiment Vissol.
  • Un relevé des façades existantes et un reportage photographique de chaque plaque dans son environnement proche ont été réalisés avant la dépose. Ce suivi est indispensable tant pour évaluer la performance de la démarche de réemploi que pour faciliter le travail de calepinage en phase EXE. Il permettra aussi de retrouver une plaque de remplacement équivalente en cas de perte ou de casse de plaques.

En conclusion, cette forte ambition de réemploi s’est traduite par une importante mobilisation de tous les acteurs dès la phase conception. Si un travail approfondi a été mené sur la solution complexe du bardage en marbre, la stratégie de réemploi se décline également sur d’autres lots : des éléments de serrurerie, des luminaires, des dalles béton ou encore la quasi-totalité des équipements de RIE seront également réemployés in situ. »