Après la restauration du Grand Canal, dont les travaux se sont achevés en juillet 2024, l’Oppic poursuit ses opérations de rénovation hydraulique au château de Fontainebleau. Mandaté pour intervenir sur l’ensemble du réseau, l’établissement conduit notamment la restauration d’une partie de l’aqueduc François Ier, ouvrage central du système d’irrigation historique du domaine. Remis en eau le 15 mai 2025, cet aqueduc retrouve aujourd’hui sa fonction première dans l’équilibre hydraulique et écologique des jardins.
Le système hydraulique du château de Fontainebleau, et sa préservation, constituent un levier essentiel pour assurer la qualité de l’eau, le maintien de la biodiversité et la pérennité des équilibres écologiques du site. Si les jardins se distinguent par la rigueur de leur composition, leurs miroirs d’eau et leur végétation maîtrisée, leur fonctionnement repose sur un réseau hydraulique historique, composé notamment d’aqueducs souterrains assurant l’irrigation et l’alimentation des bassins.
Face à une dégradation progressive de ce réseau et à des pertes d’eau significatives altérant le fonctionnement global du système, le château a engagé une restauration de l’aqueduc François Ier. Cet ouvrage, clé de voûte du dispositif hydraulique, fait l’objet d’une intervention visant à rétablir la continuité hydraulique, optimiser la gestion des ressources en eau et renforcer la résilience écologique des jardins historiques.
Classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1981, le château fascinait autant par son architecture que par la maîtrise paysagère de ses jardins. Ce raffinement s’appuyait sur un système hydraulique complexe et ingénieux, composé de canaux et d’aqueducs alimentant les bassins par un circuit gravitaire. Les aqueducs de François Ier et Henri IV, nourris par des sources naturelles comme celles des Pleus ou du Lez, acheminaient l’eau depuis les coteaux alentour vers les grands ensembles végétalisés : le Grand Parterre, le jardin anglais, l’étang des Carpes ou encore le bassin du Miroir.

Parmi ces ouvrages, l’aqueduc François Ier, construit au XVIᵉ siècle, jouait un rôle central. Long de plus d’un kilomètre, il serpentait en souterrain à travers le domaine, avec une largeur de 80 cm et une hauteur de 1,70 m. Partiellement classé monument historique depuis 1930, il incarnait un savoir-faire d’ingénierie exceptionnel, pensé pour inscrire l’eau dans la mise en scène du pouvoir royal.
Un système fragilisé par les effets du climat
Depuis plusieurs années, les bouleversements climatiques — sécheresses répétées, hausse des températures, appauvrissement des nappes — avaient progressivement fragilisé ce réseau historique. Le niveau des bassins avait baissé, la flore s’était affaiblie, les sols s’étaient modifiés, et les espèces aquatiques subissaient un stress croissant.

Les études menées par l’architecte en chef des monuments historiques, Patrick Ponsot, avec le bureau d’études Caricaie,en charge du réseau Hydraulique, entre mars 2022 et septembre 2023 avaient révélé que l’aqueduc François Ier présentait de nombreuses fuites, notamment dans sa portion située sous la pépinière. Ces pertes d’eau compromettaient la circulation entre les bassins et avaient rendu une intervention urgente nécessaire.
Un patrimoine hydraulique remis en circulation
Conduit par l’Oppic, l’opération de restauration de l’aqueduc François Ier s’était inscrit dans une démarche de gestion durable de l’eau. Dirigés par l’ACMH, les travaux réalisés sur une portion prioritaire de 412 mètres linéaires ont porté sur :
- Le curage et la dépollution du réseau
- Le dévoiement temporaire de l’eau
- La démolition des radiers et banquettes en béton
- La réalisation de dalles en béton hydrofuge
- Le nettoyage et la restauration des ouvrages enterrés maçonnés
- L’enlèvement des racines
- La réouverture des barbacanes bouchées
- Le nettoyage des barbacanes existantes
Préserver l’eau, préserver le patrimoine
Ce chantier n’avait pas uniquement vocation à restaurer un ouvrage ancien : il visait aussi à assurer la pérennité d’un système vivant, dans lequel l’eau, au-delà de sa fonction esthétique, joue un rôle écologique essentiel. Certaines plantes aquatiques, telles que les Characées, contribuent encore aujourd’hui à maintenir la qualité de l’eau, en filtrant les nitrates et en limitant la prolifération d’algues.
Comme le rappelle Angélique Periere, chargée d’opérations à l’Oppic : « L’approche combinée de la conservation patrimoniale et de la gestion durable des ressources, met en évidence l’importance du système hydraulique du château de Fontainebleau. Sa préservation joue un rôle essentiel en contribuant à la qualité de l’eau, à la protection de la biodiversité et à l’équilibre du paysage. »

Maîtrise d’œuvre
Patrick Ponsot, architecte en chef des monuments historiques
SARL Caricaie, Bureau d’études techniques (Hydraulique)
Entreprises
Sade : Génie Civil & Etanchéité
Lefevre : Maçonnerie – Pierre de Taille